Divorce et prestation compensatoire – Bordeaux

Vous divorcez, vous ne travaillez pas ou votre conjoint a un revenu plus élevé que le votre ? Vous appréhendez cet écart de niveau de vie qui risque de se créer entre vous et votre ex-conjoint ?

Connaissez-vous la prestation compensatoire ? Somme versée par l’époux « aisé » financièrement, au profit du conjoint défavorisé par la rupture du mariage afin de compenser la différence de niveau de vie créer par le divorce. Certes, cela concerne un nombre très faible de cas de divorce.

Qu’est-ce qu’une prestation compensatoire ?

C’est une somme d’argent versé à l’un des époux, une sorte d’indemnité pour diminuer l’écart de niveau de vie entre les époux qui résulte du divorce. Elle permet d’éviter un changement trop important dans les conditions de vie des époux, en effectuant une indemnisation compensant la disparité constatée.

Avez-vous droit à une prestation compensatoire ?

Tout couple en instance de divorce peut demander la prestation compensatoire. Quel que soit le cas de divorce, vous pouvez demander le bénéfice d’une prestation compensatoire, si le divorce créer une différence notable entre votre niveau de vie et celui de votre ex-époux.

Comment obtenir une prestation compensatoire ?

  • Essayer avant tout de parvenir à un accord entre vous : vous pouvez faire une convention réglant les conséquences de votre divorce dans tous les cas de divorce (par consentement mutuel ou contentieux). La prestation compensatoire peut donc être fixée par les conjoints. Dans les deux hypothèses cet accord est soumis à l’homologation du juge.
  • Si vous ne parvenez pas à vous mettre d’accord, faite une demande au juge : il faut faire une demande de prestation compensatoire en même temps que la demande de divorce. La prestation compensatoire ne peut être demandée après que le divorce soit devenu définitif.

En cas d’appel du jugement de divorce, la demande de prestation peut être présentée en appel pour la première fois.

Sous quelle forme la prestation compensatoire peut-elle être versée ?

  • La prestation compensatoire doit être versée sous forme de capital :

- Octroi immédiat d’une somme d’argent
- Attribution d’un droit en nature, comme l’abandon d’un droit en propriété, en usufruit ou pour l’usage et l’habitation, à titre temporaire ou viager (ex : droit d’usage d’un appartement pendant 10 ans).

  • Lorsque le conjoint débiteur de la prestation n’est pas en mesure de verser immédiatement la somme en capital, le juge peut l’autoriser à effectuer des versements périodiques sur une durée qui ne peut excéder huit ans.
  • Exceptionnellement, la prestation compensatoire peut aussi être octroyée sous forme de rente viagère, compte tenu de l’âge ou de l’état de santé de celui qui la demande. En cas d’accord les conditions peuvent être plus souples (rente temporaire ou versement du règlement sur plus de huit ans).

Comment est fixée la prestation compensatoire ?

Si la prestation est fixée par les époux eux-mêmes : les époux peuvent régler la question de la prestation compensatoire, dans cette hypothèse les époux peuvent fixer conventionnellement le montant, la forme et les modalités de la prestation compensatoire. Il peut s’agir d’une rente viagère ou temporaire, un capital ou une rente et un capital.

Si le juge fixe la prestation compensatoire : lorsque c’est le juge qui fixe la forme de la prestation compensatoire, celle-ci doit être versée sous forme de capital.

Le juge ne peut fixer la prestation compensatoire sous forme de rente que dans des cas limités (en tenant compte par exemple de l’âge avancé de l’époux créancier …).
Il est également possible de prononcer une prestation compensatoire mixte, une partie en capital et une partie en rente viagère.

Pendant combien de temps avez-vous droit à la prestation compensatoire ?

  • Lorsqu’il s’agit d’une prestation octroyée sous forme de capital : le juge a la faculté de fixer un terme sur une durée maximale de huit ans.
  • Lorsqu’il s’agit d’une rente : le juge ne peut fixer qu’une rente viagère, il ne peut pas allouer une rente temporaire. Cette interdiction n’est faite qu’au juge, les époux ont la faculté de prévoir une rente pour une durée déterminée dans leur convention soumise à l’homologation.

Comment la prestation compensatoire est-elle calculée ?

Il n’existe aucune méthode de calcul légal et chaque prestation est déterminée au cas par cas selon des critères objectifs et subjectifs. Le juge aux affaires familiales prend compte les besoins du conjoint bénéficiaire et les ressources du débiteur de la prestation compensatoire pour fixer le montant.

Il existe une liste des éléments à prendre en compte à l’article 271 du Code civil tels que l’âge, l’état de santé, la durée du mariage, sacrifice de la carrière de l’un au bénéfice de l’autre, perspective de retraite.

Quels sont les éléments pris en compte dans le calcul ?

A titre d’exemple :

L’article 271 du code civil énumère de façon non limitative, un certain nombre de critères que le juge va prendre en considération pour le calcul de la prestation compensatoire. La compensation tient notamment compte :

  • du passé des époux (la durée du mariage, l’âge des époux, le cas du parent qui a sacrifié ses ambitions professionnelles pour élever les enfants..).
  • du présent, avec les ressources d’un époux et les besoins de l’autre.
  • de l’évolution future des situations financières des ex-époux.

Quels éléments ne sont pas pris en compte dans le calcul ?

A titre d’exemple :

Les juges ne prennent pas en compte pour le calcul d’une prestation compensatoire :

  • une allocation de RSA car elle est fondée sur la solidarité nationale.
  • les allocations familiales ne sont pas non plus prises en compte puisqu’elles sont versées aux enfants.
  • néanmoins, les sommes versées au titre de la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants constituent des charges qui viennent en déduction des ressources de l’époux débiteur de la prestation compensatoire. Mais ces mêmes pensions ne viennent pas en déduction des besoins de l’époux créancier de la prestation dans la mesure où ce dernier ne les reçoit pas pour lui mais pour l’enfant.

Que se passe-t-il en cas de décès de celui qui paie la prestation compensatoire ?

En cas de décès du débiteur de la prestation, le paiement de celle-ci est prélevé sur la succession et dans les limites de l’actif successoral, les héritiers ne sont pas tenus personnellement du paiement de la prestation. Une distinction est à faire néanmoins :

Si la prestation s’effectue sous forme d’un capital échelonné : le solde de ce capital devient immédiatement exigible.
Si la prestation est versée sous forme de rente : celle-ci se substitue en un capital immédiatement exigible dont le montant est déterminé par un barème fixé par décret.
Les héritiers ont la faculté de décider par acte notarié, de maintenir les modalités de règlement fixées avant le décès du débiteur. Ils sont alors tenus du paiement de la prestation sur leurs fonds personnels si l’actif successoral est insuffisant.

Pouvez-vous obtenir une révision de la prestation compensatoire et à quelles conditions ?

Les modalités de versement, le montant ou la forme de versement de la prestation compensatoire peuvent être modifiés par le juge aux affaires familiales à la demande de l’un ou l’autre des ex-conjoints. Chaque époux peut invoquer un changement survenu dans sa propre situation, mais aussi se prévaloir d’une modification touchant la situation de l’autre époux.
Les époux conservent la faculté de préciser les règles de révision de la prestation dans leur convention soumise à homologation.

  • La prestation compensatoire fixée sous forme de rente peut être révisée, suspendue ou supprimée en cas de changement important dans les ressources ou les besoins de l’une ou l’autre des parties ; tel pourra être le cas en cas de licenciement du débiteur, sa mise à la retraite ou le fait pour le créancier d’avoir trouvé du travail… la révision judiciaire ne peut avoir pour effet de porter la rente à un montant supérieur à celui fixé initialement par le juge.
  • La prestation versée sous forme de capital ne peut pas être révisée dans son montant, seules les modalités de son paiement peuvent varier ou sa durée.

La prestation compensatoire et vos impôts.

L’imposition de la prestation compensatoire dépend de son mode de versement :

  • S’il s’agit d’un capital versé immédiatement ou sur une période inférieure à douze mois : le débiteur peut bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu équivalent à 25% du montant de la prestation compensatoire, dans la limite d’un plafond de 30 500€, ce qui correspond à une réduction d’impôt maximum de 7 625€.
  • S’il s’agit d’une rente versée sur une période de plus de 12 mois (qu’elle soit viagère ou temporaire) : la prestation compensatoire est alors déductible du revenu imposable de celui qui la verse, et imposable entre les mains de celui qui la reçois.
  • S’il s’agit d’un capital réglé sur une période supérieure à douze mois : hypothèse où le débiteur obtient du juge le versement échelonner du capital dans un délai de huit ans sous forme de versements périodiques. La prestation compensatoire est imposable entre les mains du créancier et déductible des revenus du débiteur.
  • S’il s’agit d’un abandon de droit : cela peut donner lieu au paiement d’un droit fixe si elle est versée sur des biens propres, à une taxe de publicité foncière si elle est versée sur un bien immobilier propre ou un droit de partage si concerne un bien commun ou indivis.

Quels recours si votre ex-conjoint ne paie pas ?

Si le paiement n’a pas lieu volontairement, vous disposez de plusieurs moyens pour en obtenir le paiement :

  • le paiement direct : pour recouvrer la prestation compensatoire sous forme de rente, cette procédure permet d’obtenir le paiement par des tiers qui disposent de sommes dues au débiteur (employeur, organisme bancaire). Le créancier doit s’adresser à l’huissier de justice du lieu de sa résidence, lui fournir le jugement relatif à la prestation et tout renseignement sur le débiteur (les frais de procédure sont à la charge du débiteur).
  • La saisie attribution : elle peut être utilisée pour les prestations versées sous forme de capital ou sous forme de rente. Cette procédure permet au créancier de récupérer immédiatement les sommes disponibles sur les comptes bancaires de son débiteur. Le créancier doit saisir l’huissier de justice du lieu de résidence du débiteur qui signifiera à la banque de l’intéressé un acte de saisie.
  • La saisie vente : elle permet de faire saisir et vendre les biens mobiliers du débiteur.
  • Le recouvrement par le Trésor public : si aucune des procédures ci-dessus n’a permis le recouvrement de la prestation sous forme de rente, les services du Trésor public peuvent, après une demande de la part du créancier, se charger de recouvrer les sommes dues. La demande devra être adressée au procureur de la république du tribunal de grande instance du domicile du créancier, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

Vous pouvez également porter une plainte pénale pour le délit d’abandon de famille ; pour cela vous pouvez soit porter plainte auprès du commissariat de police, soit rédiger une plainte adressée au procureur de la République du Tribunal de Grande Instance de votre domicile, soit faire délivrer par huissier de justice une citation directe devant le tribunal correctionnel de son domicile. Ce délit est puni de deux ans d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

Vous vous remariez ou vous vivez en concubinage, avez-vous toujours droit à la prestation compensatoire ?

La prestation compensatoire peut être supprimée en cas de remariage ou de concubinage de la personne bénéficiaire d’une rente seulement mais pas pour le cas du versement en capital, sauf si les parties ont décidé autrement dans leur accord.

Les juges saisis d’une demande de révision ou de suppression de la prestation compensatoire, apprécieront au cas par cas les situations afin de rechercher si le concubinage ou le remariage de l’ex-époux créé un changement important dans ses ressources et ses besoins.

Quelle est la différence entre la prestation compensatoire et une pension alimentaire ?

La pension alimentaire et la prestation compensatoire ont une finalité distincte :

Une pension alimentaire est un subside versé à une personne envers laquelle on est tenu d’une obligation de secours (enfants, parents, voire conjoint, la plupart du temps). Le divorce mettant fin à l’obligation de secours entre les époux, la pension alimentaire ne peut être due après le divorce à l’ex-conjoint. La pension alimentaire est versée, notamment, aux enfants dont on n’a pas la garde. Elle est seulement alimentaire.
La prestation compensatoire, quant à elle, a pour objet de compenser la baisse de niveau de vie consécutive à un divorce et est donc destinée au seul conjoint. Si elle a un aspect alimentaire elle est aussi indemnitaire.

Me Annie ROLDÃO – 06 64 32 21 03 – annie.roldao@orange.fr